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Les enjeux de la transition écologique pour les entreprises

Le Medef a publié un « Guide des acteurs et outils de la transition écologique » destiné aux chefs d'entreprise de TPE/PME pour leur permettre d'être pleinement acteurs de la transition écologique, d'en saisir les opportunités et d'en surmonter les difficultés. Ce guide rappelle, notamment, que nous sommes entrés dans l'ère de l'Anthropocène dans laquelle l'homme devient la principale force de changement du système terrestre. Face aux conséquences du changement climatique ou de l'érosion de la biodiversité, Il doit ajuster son espace économique pour assouvir ses besoins du système terrestre.

Exploration des données et enjeux scientifiques majeurs - Les territoires sont confrontés à des défis, tels que le réchauffement climatique et la perte de biodiversité. Pour répondre à ces enjeux, ils doivent non seulement prévenir les risques, mais aussi maintenir leur attrait, préserver leurs ressources et adopter des pratiques d'aménagement durable. L'activité des entreprises est directement affectée par les conséquences du changement climatique, telles que la sécheresse, les incendies, les inondations, la fonte des neiges, les vagues de chaleur, la diminution de la productivité et la pollution.

Les risques associés à l'ère de l'Anthropocène

L'entrée dans l' ère de l'Anthropocène (nouvelle ère géologique caractérisée par le fait que les humains sont devenus la principale force de changement du système terrestre) engendre deux catégories de risques externes pour les entreprises.

Ceux qui sont classés en risques physiques (par exemple, inondations, sécheresses, vagues de chaleur...), liés au changement climatique et à l'érosion de la biodiversité, et les risques de transition (risques définis comme environnementaux liés à des changements sociétaux), ces derniers étant classés eux-mêmes en 4 catégories :

-les risques réputationnels : associés aux dommages sur l'environnement (par exemple, boycott d'un produit) ;

-les risques juridiques : du fait du renforcement des dispositifs de protection juridique dans le domaine environnemental (par exemple, les procès pour inaction climatique, pour non-protection de la biodiversité endémique, pour les enjeux de santé liés à la pollution) ;

-les risques de marché : du fait des clients qui ne souhaitent pas associer leurs achats à des impacts négatifs, surtout quand une alternative plus responsable existe (par exemple, les alternatives végétales à la viande, les alternatives seconde­ main au neuf et les mobilités alternatives);

-les risques financiers : associés à la prise en compte croissante des impacts et démarches environnementales par les investisseurs, assureurs et pouvoirs publics (par exemple, l'interdiction des panneaux publicitaires dans les villes de Grenoble et de Lyon, le non-financement de projets considérés comme non-durables).

Pour chaque entreprise, l'ampleur du risque est déterminée à la fois par le niveau des actions qu'elles a mises (ou non) en place pour limiter les effets de la crise écologique et par la capacité d'adaptation à ces deux catégories de risques (physiques et de transition).

Des concepts pour permettre de comprendre les limites de la planète

75 % de la surface terrestre et 66 % des océans seraient altérés par l'activité humaine. La planète nous offre trois catégories de « services gratuits », appelés les services écosystèmiques :

-l'approvisionnement (qualité et régulation de l'eau, régulation du climat, pollinisation, matériaux, énergie, ressources médicales, alimentation) ;

-les services culturels/apports immatériels (génétique, apprentissage et inspiration, expériences physiques et psychologiques, soutien identitaire, création et entretien d'habitats) ;

-la régulation (des océans, des évènements extrêmes, des maladies et des nuisibles, de la qualité de l'air et des sols).

Ces ressources ne sont pas inépuisables et imposent des limites, elles-mêmes identifiées par les deux concepts développés ci-après.

Le concept des limites planétaires a permis d'identifier et de quantifier des niveaux de pressions engendrés par les activités humaines que la planète peut absorber sans compromettre ses conditions d'habitabilité. Le tableau ci-dessous reprend les 9 limites planétaires. Actuellement, 6 limites sur les 9 répertoriées auraient été d'ores et déjà dépassées et bientôt 7 en ce qui concerne celle de l'acidification des océans.

L'état des 9 limites planétaires
Changement climatique
Limite dépassée (risque élevé)
Érosion de la biodiverstié
Limite dépassée (risque élevé)
Perturbation des cycles biogéochimiques
Limite dépassée (risque élevé)
Changement d'usage des sols
Limite dépassée (risque croissant)
Introduction d'entités nouvelles dans la biosphère
Limite dépassée (risque élevé)
Augmentation des aérosols dans l'atmosphère
Limite non dépassée
Appauvrissement de l'ozone stratosphérique
Limite non dépassée
Acidification des océans
Limite non dépassée
Utilisation et cycle de l'eau douce
Limite dépassée (risque croissant)
D'après le nouveau cadre publié par le Stockholm Resilience Centre en septembre 2023 (Richardson et al.)

Développée par Kate Raworth, la théorie du Donut vient positionner la sphère économique comme un sous-système dépendant de notre société , elle-même dépendante de l'environnement. Cette vision plus globale permet de définir la taille optimale de l'économie par rapport aux ressources naturelles disponibles. Ainsi, il existerait un plancher social, c'est-à-dire une taille minimale de l'économie permettant de répondre aux besoins vitaux pour chaque individu, et un plafond environnemental représentant la taille à ne pas dépasser pour ne pas détériorer la nature. Le donut est représenté par une forme torique dont l'intérieur détermine l'insuffisance des besoins essentiels de l'humanité et l'extérieur, le dépassement des limites écologiques. Ainsi, le « donut » en question est l'espace économique dans lequel l'humanité peut assouvir ses besoins dans le respect de notre environnement. Selon cette théorie, 4 limites parmi les 9 au total seraient actuellement transgressées comme :

-le changement climatique ;

-la charge d'azote et de phosphore ;

-la reconversion des terres ;

-la perte de la biodiversité.

De l'international au niveau européen, quels cadres de référence ? - En 2015, l'Organisation des Nations unies (ONU) a établi 17 objectifs mondiaux pour assurer un avenir durable à horizon 2030. L'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s 'est chargée de les adapter et de les mettre en œuvre au niveau local. En effet, elle estime que 65 % des 169 cibles qui sous-tendent l'ensemble des 17 objectifs (repris dans le tableau ci-dessous) ne pourront être atteintes sans la participation des administrations locales et régionales.

Les 17 objectifs de développement durable de l'ONU
1
Pas de pauvreté
10
Inégalités réduites
2
Faim « zéro »
11
Villes et communautés durables
3
Bonne santé et bien-être
12
Consommation et production responsables
4
Éducation de qualité
13
Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques
5
Égalité entre les sexes
14
Vie aquatique
6
Eau propre et assainissement
15
Vie terrestre
7
Énergie propre et d'un coût abordable
16
Paix, justice et institutions efficaces
8
Travail décent et croissance économique
17
Partenariats pour la réalisation des objectifs
9
Industrie, innovation et infrastructure

En décembre 2015, l'accord de Paris (COP21) sur le changement climatique a lancé un appel à une solidarité entre les états. Il visait à limiter le réchauffement mondial en deçà de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels et à poursuivre les efforts pour limiter la hausse des températures à 1,5°C d'ici à 2100.

L'accord de 2022 (COP15), appelé « accord de Kunming-Montréal », a provoqué un tournant historique en aboutissant à un nouveau cadre mondial de la biodiversité. 4 objectifs et 23 cibles internationales de préservation et de restauration de la nature pour 2030 et 2050 ont été définis. Voici quelques exemples de cibles à atteindre collectivement comme :

-réduction de la moitié des pesticides et des excès de nitrates ;

-30 % de restauration des écosystèmes terrestres et maritimes dégradés d'ici à 2030 ;

-protection de 30 % d'aires terrestres et de 30 % d'aires marines ;

-réduction de 50 % de l'introduction d'espèces exotiques envahissantes ;

-arrêt de l'extinction des espèces protégées dues aux activités anthropiques d'ici 2050 ;

-suppression progressive des subventions néfastes à la biodiversité (a minima 500 milliards de dollars par an d'ici 2030 ;

-mobilisation a minima de 200 milliards de dollars par an jusqu'à 2030 pour mettre en œuvre les stratégies et plans d'actions nationaux pour la biodiversité.

L'Union européenne a mis en place une diversité de politiques environnementales sectorielles visant à traiter divers enjeux écologiques. Avec l'Acte unique européen en 1987 consolidé par les traités de Maastricht (1993) et d'Amsterdam (1999), l'environnement devient un domaine d'action majeur de l'Union européenne. Des directives spécifiques ont été adoptées, couvrant des aspects tels que la gestion des déchets, la qualité de l'air, la biodiversité, ou encore l'énergie :

-Le Pacte vert européen (en anglais, Green Deal) est une initiative de l'Union européenne visant à faire de l'Europe le premier continent neutre pour le climat d'ici 2050. L'objectif intermédiaire de 2030 est de réduire de 55 % les émissions de gaz à effet de serre (GES) par rapport à 1990 ;

-la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive. En français, la directive sur les rapports de développement durable des entreprises) a pour mission d'encadrer et de standardiser le reporting extra-financier au niveau européen pour une plus grande transparence et comparabilité des entreprises. L'ambition de ce règlement est également de permettre aux entreprises de mieux comprendre leurs relations d'interdépendance avec leur environnement (voir sa transcription en droit français, voir dépêche https://rfcomptable.grouperf.com/article/0522/ms/20231218175432856.html).

Mouvement des entreprises de France, guide « guide des acteurs et outils de la transition écologique », février 2024